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Natural Resource Governance around the World

English version: Land Policies and Agrarian Reform. Proposal Paper. Part I. How might the rights of land users be secured? (1 of 2)

Cahier de propositions POLITIQUES FONCIERES ET REFORMES AGRAIRES. Partie I. Comment sécuriser les droits des usagers ? (1 de 2)

Origine et fondements des droits. Les différents systèmes d’enregistrement et de validation des droits

Documents of reference

Merlet, Michel. Cahier de propositions. Politiques foncières et réformes agraires. Octobre 2012. Réseaux APM,IRAM. 130 p.

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D’emblée, évitons de limiter la réflexion aux « propriétaires », en cherchant à prendre en compte l’ensemble des ayants droit et l’ensemble des usagers. Nous pourrons ainsi souligner les points communs entre les différentes situations et ne faire « des propriétés »13 qu’un cas particulier parmi d’autres.

1. Origine et fondement des droits

La première interrogation à laquelle nous sommes confronté est celle de l’origine des droits des individus ou des groupes sociaux sur la terre. Cette question renvoie à son tour à celle de la reconnaissance des acteurs, à la prise en compte des différentes perceptions que chacun peut avoir des autres et de la légitimité des diverses formes d’organisation ou d’intervention14. Il n’est pas possible de reconnaître des droits à des groupes dont la spécificité même n’est pas reconnue: il ne s’agit donc pas seulement d’un problème légal, mais aussi d’un problème social.

Au risque de simplifier quelque peu, nous distinguerons deux grandes familles de fondements aux droits sur la terre15 :

  • les droits acquis au cours du temps, souvent par la validation sociale d’un rapport de force. Sur le plan légal, c’est le mécanisme de la prescription acquisitive (usucapion) qui est alors utilisé: les droits antérieurs cessent, sous certaines conditions, d’être valables au bout d’une période dont la durée peut varier considérablement suivant les pays. Ces droits sont souvent, mais pas toujours, en relation avec le travail investi, comme une extension des droits sur les produits de ce travail.

  • les droits concédés par l’Etat (titres fonciers, ventes, dons, …). Cas typique des situations coloniales, le système juridique cherche à établir ce type de droit indépendamment du premier, même si en réalité, la faculté de l’Etat d’attribuer ces droits relève en dernière instance du phénomène antérieur (domination coloniale acquise par la force). Les instruments fondamentaux sont alors le titre foncier, qui semble fonder le droit, et le cadastre.

Cette description ne serait pas complète si nous ne mentionnions pas les justifications idéologiques qui peuvent être présentées comme des fondements des droits: ainsi l’invocation de droits d’origine divine peut prendre des formes très variées. Dans le cadre de la pensée unique dont nous vivons la généralisation, l’affirmation du caractère universel de la propriété relève d’une certaine façon de cette même logique.

2. Les différents systèmes d’enregistrement et de validation des droits

L’enregistrement et l’information sur les droits de propriété

Il existe de par le monde différents systèmes d’enregistrement des droits de propriété, avec ou sans cadastres et registres de la propriété. Ces systèmes sont fort dissemblables et leurs différences sont liées à l’histoire (voir encadré_3 et encadré_4).

En France, le système foncier n’établit pas les droits de manière absolue, mais se fonde sur une très forte présomption de l’existence de ces droits. En Allemagne, le livre foncier consigne des droits qui ont été validés au préalable par des juges. Dans les deux cas, ces droits se sont constitués progressivement au cours de l’histoire, du fait des rapports de force, des lois, mais ne proviennent pas principalement de la remise de titres fonciers par l’Etat.

Encadré # 3 Deux exemples de systèmes d’information sur les droits fonciers16

Le système français d’informations foncières17

Il est fondé sur le Cadastre et sur la Conservation des hypothèques. Ces deux institutions dépendent du Ministère des Finances (Direction des Impôts). Il a trois missions essentielles: fiscale (évaluation des biens fonciers et établissement des bases d’imposition), juridique (identification des propriétés, des propriétaires et de leurs droits) et technique (coordination et vérification pour la cartographie à grande échelle).

Le cadastre a été établi à l’époque napoléonienne avec un but fondamentalement fiscal. Il se contente de prendre en compte les propriétaires apparents, susceptibles de payer les impôts. Si les documents cadastraux (plan et fiches d’information sur les propriétaires des parcelles) n’ont pas officiellement d’effet juridique en soi, l’articulation établie progressivement avec le système de publicité foncière (extraits cadastraux et numéros d’identification spatiale des parcelles) a fait que la jurisprudence leur reconnaisse une certaine valeur probante.

Le système français de publicité foncière se limite à l’acceptation du dépôt des actes relatifs aux droits réels et à leur transcription à effet de publicité à l’égard des tiers, au niveau des institutions déconcentrées de conservation des hypothèques. Selon le droit français, c’est la succession de contrats entre les parties, publiquement reconnus et non remis en cause, qui crée à la longue les droits. Les contrats sont établis par les notaires (actes d’achat et de vente, et autres actes liés aux droits réels), et leur copie est archivée à la conservation des hypothèques.

Le système allemand

Le livre foncier germanique a en premier lieu une mission juridique: de validation des droits, d’enregistrement et de publicité des droits envers les tiers. Il dépend du Ministère de la Justice.

Il est géré par des juges fonciers, qui examinent le fonds et la forme des droits lors de l’inscription. Ces droits recouvrent l’ensemble des droits existants sur un territoire qui sont transcrits après avoir été validés dans le registre18. De cette façon, les énonciations du Livre foncier ont une force probante absolue. L’inscription vaut titre et prouve l’existence d’un droit envers les parties et vis à vis des tiers.

Les propriétés font l’objet d’un bornage obligatoire, qui constitue une opération d’initiative publique. Le livre foncier est articulé avec le cadastre qui décrit les immeubles et les identifie. Le cadastre peut dépendre de ce même ministère ou d’un autre. Il est utilisable également à des fins fiscales.

Ce système offre certes une grande sécurité, mais sa mise en place est longue et coûteuse.

Le système Torrens, au contraire, et les systèmes d’immatriculation qui en sont dérivés sont nés dans des contextes coloniaux et ils différent toujours des régimes fonciers des métropoles: l’attribution de la terre par la puissance coloniale (et la remise de titres qui l’accompagne) constituent la seule source de droit reconnue sur le foncier.

En Amérique Latine, le système foncier établi par les espagnols et les portugais dérive de la même logique19, qui était aussi celle des colonies de l’Empire romain, comme le souligne J. Comby. On retrouve aujourd’hui la même difficulté à reconnaître l’existence de droits antérieurs à l’occupation coloniale en Amérique Latine, en Afrique, en Asie (par ex. aux Philippines20) ou en Océanie.

Encadré # 4 Le système TORRENS et ses variantes.

(à partir de Joseph Comby21 et Jacques Gastaldi22)

C’est pour l’Australie, sous l’emprise coloniale de l’Angleterre, que le Colonel Robert Torrens a mis au point son système. (adoption de l’Act Torrens en 1858). Il y était particulièrement facile de faire table rase de tout droit d’occupation antérieur: les aborigènes australiens n’ont d’ailleurs été reconnus citoyens australiens que depuis 1967 et la Cour suprême de ce pays ne les a reconnus comme « premiers habitants » qu’en décembre 1993 !

D’une façon générale, les pratiques coloniales ont consisté, après avoir découvert une terre « vierge de droits », à la répartir entre les nouveaux arrivants. C’est ce qui s’est passé en Amérique du Nord, après avoir « débarrassé » les terres des indiens. Le découpage sur plan était le travail du cadastre, l’autorité coloniale attribuait des terres à chaque arrivant, et l’inscription au livre foncier du nouveau colon valait titre de propriété. Les transferts ultérieurs étaient portés sur le registre. Le système Torrens est venu mettre de l’ordre dans ces pratiques, dans la plupart des colonies.

L’immatriculation n’est pas obligatoire et le système Torrens ne garantit les droits que sur les terres immatriculées. En apparence identique au livre foncier germanique, l’inscription une fois opérée est définitive et a une force probante absolue. Le cadastre n’est pas séparé du Registre foncier et toute personne qui requiert l’immatriculation est tenue de faire établir un bornage et un plan par des géomètres, qui sont intégrés au cadastre. Mais cette similitude n’est qu’apparente, puisque le système ne reconnaît comme valides que les droits concédés par l’Etat.

Il existe d’autres systèmes d’immatriculation dérivés du système Torrens ou similaires. Certains essayent de prendre en compte une partie des droits coutumiers, mais tous relèvent en dernière instance de la logique coloniale.

Le système Torrens perpétue et institutionnalise la spoliation coloniale. Or c’est ce système qui a servi le plus souvent de modèle aux institutions internationales dans leurs programmes de régularisation foncière. On comprend dès lors que loin de limiter les conflits, ces interventions tendent à les exacerber.

Devant l’évidence, et ce, en particulier dans le contexte africain, la Banque Mondiale a du reconnaître que la propriété privée n’était pas toujours la meilleure solution pour atteindre la sécurité foncière. Alors qu’elle recommandait en 1975 l’abandon des systèmes de tenure communaux, la division des terres communales et leur attribution privative individuelle (freehold titles), Binswanger et Deininger font état en 1999 que la Banque reconnaît désormais que certaines formes de tenure communales peuvent augmenter la sécurité foncière et servir de base à des transactions d’une façon moins coûteuse que les titres de propriété individuels23. Elle reconnaît également que les systèmes coutumiers évoluent, qu’ils ne sont pas nécessairement archaïques et qu’il convient de trouver au cas par cas quelle forme de tenure, individuelle ou collective, est la mieux adaptée24.

Enregistrement des droits fonciers multiples et sécurisation foncière. Quelques exemples africains.

Il s’avère impossible de décrire les différents droits sur le foncier que l’on rencontre en Afrique sur la base des catégories conceptuelles du droit occidental25. Très fréquemment, on trouve des droits d’usage plus ou moins exclusifs appartenant à des groupes sociaux ou des individus distincts, qui peuvent d’ailleurs varier au cours de l’année. Au Sud du Mozambique, par exemple, la terre sera considérée comme celle d’une communauté villageoise ou d’une tribu, les anacardiers appartiendront à certains individus, d’autres individus auront le droit de mettre en culture la parcelle, et un groupe social pouvant être distinct aura le droit de chasse; ces différents droits pourront être transmis de façons différentes et plus ou moins indépendantes.

La théorie des maîtrises foncières d’Etienne Le Roy26, dans le prolongement de divers chercheurs27, précise les différents régulations possibles des rapports de l’homme à la terre en croisant différents types de droits (accès, extraction, gestion, exclusion, aliénation) et différents types de gestionnaires de ces droits (public, commun à un ou plusieurs groupes suivant des modalités qui peuvent varier, spécifiques d’une personne). C’est dans cette même perspective qu’André Marty définit les droits prioritaires mais non exclusifs à l’eau et aux ressources pastorales d’une tribu de pasteurs nomades sur leur « terroir d’attache », terrains situés le plus souvent autour d’un point d’eau qu’ils ont aménagé et qu’ils entretiennent, sur lesquels ils séjournent régulièrement à certaines périodes de l’année, et qu’ils considèrent comme leur « pays ». Mais les autres groupes nomades peuvent aussi avoir accès à ces ressources lors de leur passage, tout comme eux mêmes peuvent de façon réciproque accéder temporairement aux terroirs d’attache d’autres groupes. (voir la fiche sur la spécificité pastorale au Sahel en partie 2 du cahier)

Un certain nombre d’expériences innovantes ont essayé de prendre en compte cette réalité faite de droits multiples et superposés. C’est le cas des projet de type Plan Foncier Rural en Côte d’Ivoire au Bénin, en Guinée ou au Burkina Faso. Mais ces démarches sont complexes et difficiles. L’exemple du Plan Foncier Rural en Côte d’Ivoire en constitue une bonne illustration. (voir encadré_5 et encadré_6)

Encadré # 5 Le Plan Foncier Rural (PFR) en Côte d’Ivoire. Intérêt et limites. (1/2)28

La mise en place du Plan Foncier Rural en Côte d’Ivoire commence avec un projet pilote (1989-96). Sa méthode, pragmatique et prudente, est novatrice en ce sens qu’elle part du bas vers le haut, contrairement aux démarches normatives habituelles. Le PFR se propose d’enregistrer les droits existants sur les terrains ruraux, en en fixant les limites sur une carte au 1/10.000e et en les décrivant dans un registre pour chaque parcelle recensée. Tous les droits tels qu’ils sont perçus par les villageois, l’administration, et les autorités coutumières, sont enregistrés, tant les droits d’usage que ceux de propriété, avec l’accord et la participation active des parties prenantes, et sans en modifier, simplifier ni uniformiser les contenus. Les enquêteurs enregistrent les conflits fonciers, sans tenter de les résoudre, et en se contentant de délimiter sur le plan les zones litigieuses.

Les enquêtes foncières sur le terrain sont publiques et contradictoires, avec levé d’un procès verbal cosigné par l’exploitant enquêté et ses voisins. Les résultats des enquêtes sont restitués en assemblées publiques villageoises, suivies d’une période de publicité de 3 mois ouvrant droit à contestation et correction des droits enregistrés et des délimitations effectuées. Ce n’est qu’alors que sont élaborés les documents définitifs. L’actualisation, ou maintenance, devait passer par la création de comités villageois.

Dans la pratique, un certain nombre de problèmes se sont posés, techniques, linguistiques (les termes désignant les droits et les règles locales étant souvent difficiles à traduire en français), mais aussi des rapports avec les procédures de concession administrative, et des demandes d’attribution de terres qui pouvaient être faites sur la base des enquêtes foncières, et en ce qui concerne les attestations remises aux détenteurs des droits. Le mode de relevé basé sur la parcelle et non l’exploitation a rendu difficile la prise en compte du spectre complet des arrangements fonciers (droits délégués, droits des allochtones éventuellement transmissibles par héritage, parfois combinés avec des accès momentanés sous forme de métayage auprès d’ayants droit autochtones, cessions temporaires, mise en gage, location, …).

Toutefois, la philosophie du projet qui remettait en cause la propriété de l’Etat sur les terres non appropriées, a soulevé de nombreuses oppositions, qui ont amené à fixer un ordre de priorité dans l’enregistrement des droits, privilégiant ceux qui étaient reconnus officiellement. Une autre concession de taille fut de reconnaître le Ministère de l’Agriculture détenteur officiel des plans fonciers, et responsable de leur actualisation.

Si le PFR de Côte d’Ivoire a démontré qu’il était techniquement possible de prendre en compte les droits superposés dans la constitution de ce que l’on pourrait appeler un « cadastre coutumier », il a aussi montré que le véritable problème était celui de la gouvernance locale, de la capacité sociale de gestion du foncier et des ressources. C’est un thème sur lequel nous reviendrons un peu plus avant.

Encadré # 6 Le Plan Foncier Rural (PFR) en Côte d’Ivoire. Intérêt et limites. (2/2)

Si malgré des réserves de l’administration, des récépissés puis des extraits de recensement ont bien été remis aux usagers individuels après la mise en place du Plan Pilote, aucun document foncier collectif n’a été remis aux villages pour attester de leurs droits sur leurs terroirs. Le fait de ne pas créer d’instance locale chargée de l’actualisation permanente des dossiers fonciers a constitué un autre problème de taille, non seulement en rendant la maintenance du système quasi impossible, mais aussi en hypothéquant toute possibilité d’améliorer la gouvernance locale par rapport à la gestion du foncier.

Si le projet pilote a démontré qu’il était techniquement possible à un coût peu élevé de faire l’inventaire des parcelles et des droits qui leur sont liés (30 à 70 Francs français par ha estimés pour la phase de généralisation au niveau national de l’expérience), il a aussi montré que sans une volonté politique claire, ce type d’opération peut être vidé de son contenu.

La loi sur le Domaine Foncier Rural, votée en 1998, marque la victoire des partisans d’une gestion centralisée des terres par l’Etat et de la privatisation des ressources foncières suivant une conception occidentale de la propriété: elle revient à un système d’immatriculation foncière généralisé. L’immatriculation doit être requise au plus tard 3 ans après la remise des certificats fonciers. L’accès à la propriété est limité à l’Etat, aux collectivités publiques, et aux personnes physiques ivoiriennes, ne laissant aux personnes d’origine étrangère n’ayant pas obtenu la nationalité ivoirienne que la possibilité de droits d’usage non sécurisés2930.

Sur la base de méthodologies distinctes, la mise en place du Code Rural au Niger et le projet GELOSE avec la Sécurisation Foncière Relative à Madagascar essayent également de prendre en compte et de sécuriser des droits multiples sur un même terroir.

La démarche de mise au point du Code Rural au Niger, commencée il y a bientôt 10 ans a nécessité de nombreuses consultations auprès des différentes groupes sociaux et est petit à petit en train d’être mise en place sur le terrain par le biais de Commissions Foncières qui enregistrent au niveau local les différents droits des usagers, en assurent la publicité et l’actualisation. Ces commissions incorporent les autorités coutumières qui avaient un rôle important en matière de gestion foncière, mais élargissent en même temps leur composition en intégrant des membres des différents services de l’administration, des représentants des différents usagers, et en travaillant non plus au niveau d’une unité de chefferie traditionnelle, mais de plusieurs chefferies voisines. Le processus est loin d’être terminé, et la reconnaissance des droits des pasteurs nomades, malgré des concepts nouveaux inscrits dans les textes juridiques du Code Rural, n’est pas encore définitivement acquise. On note des avancées fort intéressantes dans certaines zones, qui démontrent que la méthode peut être très efficace, en particulier quand le processus est appuyé et accompagné de façon appropriée par des intervenants qui ne sont pas directement partie prenante dans les enjeux locaux31. D’une certaine façon, tout en partant d’une approche rattachée à la tradition française, l’expérience nigérienne cherche à transiter vers des mécanismes se rapprochant des pratiques de la common law britannique (voir encadré_7).

Encadré # 7 Deux démarches opposées en matière de reconnaissance des droits dans les anciens empires coloniaux français et britanniques en Afrique.32

En Afrique de l’Ouest, l’administration coloniale britannique s’est largement appuyée sur les structures locales de pouvoir et d’autorité pour rendre la justice, maintenir l’ordre et la loi et lever les impôts. A l’exception de quelques zones de plantation et urbaines, l’essentiel des territoires a été gouverné sous forme d’administration indirecte et par le droit coutumier, via des tribunaux locaux, selon les principes reposant sur la tradition britannique de la common law. Fondées sur la jurisprudence, les procédures de la common law ont une grande flexibilité et permettent de nouvelles interprétations lorsque les circonstances changent. Elle maintient ainsi une relation étroite avec les valeurs du groupe social concerné, mais est en même temps susceptible d’aboutir à des abus en faveur d’intérêts locaux puissants, et peut donc aller à l’encontre des principes d’équité.

Ce système juridique diffère profondément d’un système de codification, qui définit depuis le centre un ensemble de règles devant s’appliquer uniformément dans tout un pays.

Les deux systèmes de common law et de loi codifiée sont fondés sur les expériences historiques de l’Angleterre et de la France sur les trois ou quatre siècles passés, et ne peuvent être compris sans se référer aux tensions issues de la guerre civile anglaise du XVIIième siècle et de la révolution française de 1789 et ses suites.

Les types de rapports entre gouvernement et citoyens qui en ont résulté continuent être reflétés par les systèmes juridiques de ces pays et par les systèmes administratifs et juridiques introduits dans les pays qu’ils ont colonisés.33

La Sécurisation Foncière Relative à Madagascar constitue une autre expérience intéressante à bien des égards34. Il ressort de l’analyse de Christophe Maldidier qu’elle ne prétend toutefois n’être qu’une étape intermédiaire avant la mise en place de véritables titres de propriété.

A Madagascar tout comme dans les cas de la Côte d’Ivoire ou du Niger, malgré le chemin parcouru, la rupture avec les schémas idéologiques liés à la propriété absolue reste encore insuffisante. En conclusion, les systèmes d’enregistrement des différents types de droits sont encore loin d’être pleinement opérationnels dans la prise en compte des réalités complexes des droits multiples que l’on trouve dans beaucoup de sociétés africaines et indigènes. Si l’application de démarches nouvelles et diversifiées s’est heurtée à de nombreux obstacles, celles-ci présentent toutefois un intérêt évident, et ont un impact réel sur l’évolution de la capacité des sociétés rurales à gérer les ressources foncières.

Il semble donc indispensable de poursuivre ces expériences en prenant conscience qu’il s’agit d’une entreprise de longue haleine, nécessitant la constitution d’un véritable capital sociétal35 adapté au contexte actuel. Ce n’est qu’en appuyant dans la durée la constitution d’institutions locales démocratiques rénovées capables d’assurer une gestion durable des droits dans l’intérêt des majorités que l’on pourra durablement sécuriser les droits des différents usagers du foncier et des ressources naturelles. (Voir ci-dessous).

Comment sécuriser les droits des usagers qui ne sont pas « propriétaires »: les locataires, métayers et bénéficiaires de délégations de droits diverses ?

Les surfaces agricoles travaillées en faire-valoir indirect représentent au niveau mondial des quantités considérables, dans les pays en voie de développement, mais aussi dans les pays développés. La sécurisation des droits des exploitants qui ne sont pas propriétaires constitue donc un enjeu fondamental pour des millions de producteurs36.

Le faire-valoir indirect sous ses différentes modalités (prêts, location, métayage, avec des variantes infinies) répond à des situations qui peuvent être radicalement différentes suivant les systèmes fonciers dans lesquels il s’insère. Il permet d’augmenter la mobilité du foncier et de réaliser des ajustements qui seraient impossibles par le biais des cessions de propriétés foncières37.

L’Europe continentale offre des exemples intéressants et divers de sécurisation des droits des fermiers et des métayers. Le Danemark a fait figure de pionnier dans ce domaine en adoptant dès 1786 un statut du fermage moderne38. On retrouve des législations protégeant les fermiers dans la plupart des pays européens, de production familiale marchande dominante. Le recours à la location se réalise selon les cas plus ou moins entre membres d’un même famille, et n’a pas le même rôle ni les mêmes implications suivant la façon dont s’opèrent les héritages et la législation les concernant (il existe deux grands types de situations suivant le système juridique: 1/ héritage égalitaire entre frères et sœurs, impliquant un partage des droits fonciers à chaque changement de génération et 2/ possibilité d’un héritage ne fractionnant pas les exploitations: dérivé des systèmes avec « droit d’aînesse »).

Bien que la France ait été à l’origine de l’invention historique du concept de propriété absolue, c’est paradoxalement dans ce pays que nous trouvons un des exemples les plus radicaux de sécurisation des droits des locataires et des métayers. Cette politique, adoptée au milieu du XXième siècle, a largement contribué à rendre possible la modernisation de l’agriculture familiale dans les régions où le faire valoir-direct n’était pas dominant. (voir encadré_9)

Encadré # 9 Le statut du fermage en France.39

Les lois sur le statut du fermage datent des années 40 (modification du Code Civil du 04/09/43, puis 17/10/45 avec extension au métayage en 1946). L’agriculture française a alors grandement besoin de moderniser ses techniques de production. Les textes concernant le statut du fermage font partie aujourd’hui du Code Rural.

Un accès à la terre garanti dans la durée à l’exploitant

  • Les contrats sont écrits. La durée minimale légale du bail est de 9 ans. Des baux à long terme de 18, 25 ans ainsi que des baux de carrière (dont le terme est fixé à l’âge de la retraite du preneur) sont aussi possibles.

  • Le preneur a droit au renouvellement pour 9 ans, sauf en cas de résiliation pour motif grave ou exercice du droit de reprise (le bailleur ne peut reprendre le bien loué que pour le travailler lui-même ou son conjoint ou au profit d’un descendant majeur ou mineur émancipé de plein droit, qui doit participer aux travaux de l’exploitation de façon effective et permanente et occuper personnellement les bâtiments d’habitation du bien repris).

  • en cas de décès du preneur, le bail continue au profit de son conjoint, de ses descendants et de ses ascendants participant à l’exploitation ou y ayant participé effectivement au cours des 5 années antérieures au décès.

  • Le preneur qui a apporté des améliorations au fonds loué (travail ou investissement) a droit à l’expiration du bail, à une indemnité du bailleur.

  • Sous réserve d’avoir exercé la profession agricole pendant au moins 3 ans et d’exploiter le fonds en vente pour lui-même, et sous certaines conditions liées au contrôle des structures, le locataire est prioritaire pour acheter la terre si le propriétaire souhaite la vendre. (droit de préemption)

Un niveau de rente foncière contrôlé par l’Etat

  • Des minima et des maxima entre lesquels le loyer peut varier sont fixés par arrêté préfectoral et par région agricole, tant pour les terres que pour les bâtiments d’exploitation.

Un dispositif spécifique de règlement des conflits

  • Une juridiction spécifique a été créée pour traiter de façon efficace les différents entre propriétaires et locataires et faire en sorte que la loi puisse être effectivement appliquée. Ce sont les tribunaux paritaires des baux ruraux qui sont compétents en premier ressort pour tous les litiges provenant de l’application du statut du fermage et du métayage. Ils sont constitués par 2 propriétaires bailleurs et 2 producteurs preneurs, et le juge d’instance, qui en assume la présidence.

Articulation avec les autres politiques de développement

  • Le contrat de bail est soumis au contrôle des structures, politique ayant pour objectif d’éviter une concentration trop forte de la terre et l’obtention d’exploitations viables. La validité du contrat est liée au respect de cette réglementation et à l’obtention par le preneur de l’autorisation d’exploiter.

Le cas français a poussé très loin la sécurisation des droits des producteurs agricoles du fait de l’existence d’organisations paysannes puissantes et d’un rapport de force favorable au niveau national. Cette politique n’a pas fait chuter la quantité de terres mises en fermage et l’objectif de modernisation des exploitations a été atteint. Sans avoir besoin de faire une réforme agraire, les propriétaires fonciers ont été privés dune bonne part de leurs droits, la rente foncière pour les terres agricoles a été réduite à un minimum symbolique et les exploitants ont obtenu les garanties nécessaires pour la pouvoir investir dans la durée.40

Par contre, la transposition de cette politique en Espagne a entraîné de la part des propriétaires une réaction de refus de céder leurs terres en faire valoir indirect. La faiblesse relative des organisations paysannes espagnoles, par rapport aux organisations agricoles en France constitue probablement un des éléments explicatifs principaux de l’échec relatif de cette politique dans ce pays.

Bien évidemment, l’intérêt de cette discussion n’est pas limité à l’Europe. La réflexion sur la nature des droits délégués et sur les manières de les sécuriser est aussi à l’ordre du jour en Afrique de l’Ouest. L’importance des droits superposés dans les systèmes fonciers africains pose un certain nombre de problèmes insolubles quand on cherche sécuriser les usagers uniquement par le biais de la remise de titres de propriété. Depuis quelques années, un axe de travail prometteur se développe autour de la sécurisation des contrats de délégation de droits entre les différents acteurs.41

L’Amérique Latine est le continent sur lequel le faire-valoir indirect est le moins développé, alors qu’il est probable qu’un développement des marchés locatifs, sous des formes suffisamment sécurisées, permettrait de mieux lutter contre la pauvreté en améliorant l’accès au foncier42. Cela s’explique par l’histoire agraire spécifique du continent, par le rôle joué par les réformes agraires et la colonisation des terres vierges comme principaux modes d’accès à la terre. Dans ce contexte, les propriétaires craignent en cédant leurs terres en fermage pour de longues durées de perdre leurs droits au profit des preneurs. Leur stratégie est donc de laisser ceux-ci dans la précarité, avec des locations à l’année ou même souvent pour un cycle de culture, et ce malgré les inconvénients que cela comporte pour que puissent se développer des formes de production durables et efficaces économiquement. La faible importance accordée aux agricultures familiales dans les stratégies des gouvernements, mais aussi l’absence de références de la part des mouvements paysans sur la façon dont on été traités ces problèmes dans d’autres régions du monde permettent d’expliquer pourquoi ces situations souvent contraires à l’intérêt général perdurent depuis des décennies.

De nombreux pays ont essayé de régler par des textes légaux les problèmes d’insécurité des locataires, métayers: citons par exemple l’interdiction légale du métayage au Mali, au Cap Vert, ou dans un contexte complètement différent au Honduras. Non seulement ces mesures ne furent pas appliquées mais elles ont le plus souvent entraîné des effets induits pervers, aboutissant souvent à une dégradation des conditions de travail des paysans pauvres. Ces échecs, loin de condamner dans des contextes semblables tout nouvel essai de sécuriser les exploitants en faire valoir indirect, nous rappellent une fois de plus que les lois ne font que refléter les rapports de force réels. Des changements significatifs ne peuvent survenir par le seul fait d’un changement législatif, sans mobilisation et organisation des producteurs intéressés.

Les droits des femmes sur le foncier

La sécurisation des droits des usagers sur le foncier devient encore plus difficile quand il s’agit de groupes humains dont les droits d’une façon générale ne sont pas complètement reconnus.

C’est le cas des femmes, sous des formes diverses à des niveaux variés, dans bien des régions du monde. L’exemple présenté dans l’encadré_10 en constitue une illustration.

Encadré # 10 Les droits des femmes à la terre dans quelques pays d’Amérique Centrale et des Caraïbes. Honduras, Nicaragua y République Dominicaine43

La reconnaissance des droits des femmes sur la terre est limitée par de nombreux obstacles juridiques, institutionnels et culturels, que même des changements politiques radicaux ne font pas tomber facilement.

Dans ces trois pays, les schémas socialement dominants attribuent aux femmes rurales les tâches domestiques et de reproduction, et aux hommes celles de la production. La participation des femmes dans la production directe, pourtant fort importante, n’est pas prise en compte à sa juste valeur. Bien que leurs constitutions déclarent l’égalité des personnes sans distinction de sexe, certaines lois agraires et dispositions du droit civil sont discriminantes envers les femmes.

Au Honduras, jusqu’en 1992, la loi de réforme agraire ne permettait pas la participation des femmes dans le processus d’attribution des terres en ne reconnaissant que le chef de famille comme attributaire. C’était toujours le cas en 1998 en République Dominicaine, avec des restrictions encore plus importantes. Au Nicaragua, bien que la réforme agraire de 1981 ait reconnu le droit des femmes à être directement bénéficiaires des attributions de terres, celles-ci ne représentaient en 1990 que 10% des personnes ayant reçu de la terre.

Les droits des femmes sur la terre sont très souvent limités par des dispositions législatives liées à la famille et au couple. L’absence de reconnaissance légale de l’union de fait entre conjoints (République Dominicaine) ou sa reconnaissance imparfaite, et le fait de considérer (dans les faits et souvent au niveau du Code Civil) l’homme comme le chef de famille ont des conséquences immédiates sur la reconnaissance des droits des femmes sur le foncier, ainsi que sur bien d’autres aspects, comme l’accès au crédit, par exemple. Enfin, la législation et les coutumes concernant les héritages tendent très souvent à ce que les fils héritent des terres alors que les filles héritent de biens de nature distincte (bétail par exemple).

Améliorer la reconnaissance des droits des femmes sur le foncier exige des changements en profondeur au niveau social et culturel et pas seulement des amendements juridiques. Les évolutions en cours dans certains pays montrent toutefois que les choses peuvent changer assez vite, quand des politiques différentes sont appliquées. C’est le cas dans les processus de légalisation des propriétés foncières dans certains pays d’Amérique Centrale. Au Nicaragua, entre 1997 et 2000 40% des personnes ayant pu obtenir un titre foncier de l’organisme en charge de la titularisation des terres rurales étaient des femmes, sous diverses modalités, seules ou en copropriété explicitement reconnue avec leur conjoint.

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13 Le pluriel est voulu, puisque la propriété absolue est un mythe et qu’il faut en fait parler d’ensembles de droits distincts. Pour une analyse historique de la genèse de cette fiction lors de la révolution française on pourra consulter J. Comby, L’impossible propriété absolue, dans l’ouvrage collectif de l’ADEF, Un droit inviolable et sacré, la propriété. Paris, 1989.

14 Voir André Marty, Un impératif: la réinvention du lien social au sortir de la turbulence. Expérience du Nord Mali, approches théoriques et problèmes pratiques. IRAM, 1997. inédit, 33 p.

15 Voir à ce sujet Joseph Comby, La Gestation de la propriété dans Lavigne Delville, Quelles politiques foncières pour l’Afrique rurale ? Karthala, Coopération française. 1998. Il ne s’agit ici que des fondements originels, les droits pouvant ensuite être transmis par différents types de transactions (achat, don, héritage, etc).

16 Voir Jacques Gastaldi, Les systèmes d’information foncière. dans Lavigne Delville, Quelles politiques foncières pour l’Afrique rurale ? Karthala, Coopération française. 1998. pages 449 à 460.

17 système en vigueur en France, à l’exception de l’Alsace et de la Moselle, où pour des raisons historiques, c’est le système du livre foncier germanique qui est resté en application.

18 Voir J. Comby, La Gestation de la propriété. dans Lavigne Delville, Quelles politiques foncières pour l’Afrique rurale ? Karthala, Coopération française. 1998. page 701.

19 Les 3 et 4 mai 1493, deux mois à peine après le retour de Christophe Colomb lors de son premier voyage, deux bulles du pape Alexandre VI attribuèrent aux couronnes d’Espagne et Portugal la propriété des terres découvertes, ou à découvrir, à l’Ouest d’une ligne déterminée. Ces bulles ont déterminé une fois pour toutes les conditions de la fabrication de la propriété foncière en Amérique latine : la terre est propriété de l’État (colonial, puis républicain), qui l’attribue aux individus selon ses propres critères. voir Olivier Delahaye, Des bulles papales à la réforme agraire : la fabrication de la propriété foncière agricole en Amérique latine. Revue Etudes Foncières # 89. Janvier-Février 2001.

20 Voir le débat sur les terres indigènes de la Cordillera (Luzon) et les luttes juridiques autour de la reconnaissance des droits des communautés indigènes. Merlet Michel. Land tenure and production systems in the Cordillera. Rapport de mission. FAO. Mars 1996.

21 Voir Joseph Comby. 1998. Op.Cit.

22 Voir Jacques Gastaldi, Les systèmes d’information foncière. dans Lavigne Delville, Quelles politiques foncières pour l’Afrique rurale ? Karthala, Coopération française. 1998. pages 449 à 460.

23 Deininger, Klaus; Binswanger, Hans. The Evolution of the World Bank’s Land Policy: Principles, Experience, and Future Challenges. The World Bank Research Observer, vol 14, # 2. August 1999. p 247-276.

24 Voir à ce propos le texte récent publié sur le site de la Banque Mondiale dédié aux questions foncières et intitulé « Questions & Answer on Land Issues at the World Bank », un document préparé pour les réunions annuelles des Conseils de Gouverneurs du Groupe de la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International. 29-30 Septembre 2001. Washington. La Banque y reconnaît l’échec de certains de ses programmes antérieurs, comme celui de titularisation des terres au Kenya. Ce texte est une réponse aux principaux questionnements faits à la Banque Mondiale sur ses pratiques en matière de foncier. Même si la pratique actuelle de l’institution ne correspond pas toujours aux affirmations du texte, il est intéressant de constater les évolutions du discours, inconcevables il y a une dizaine d’années.

25 Etienne Le Roy explique dans « La sécurisation foncière en Afrique » que les statuts fonciers selon le code civil français sont fondamentalement au nombre de quatre (domaine public, communaux, domaine privé, et propriété privée). Ils s’organisent autour des deux oppositions entre chose et bien (non susceptible ou susceptible d’être transformé en marchandise) et public et privé (en fonction de l’usage socialement reconnu).

26 Etienne Le Roy, La théorie des maîtrises foncières. dans E. Le Roy, A. Karsenty, A. Bernard. « La sécurisation foncière en Afrique. Pour une gestion viable des ressources renouvelables. » Ed. Karthala. Paris, 1996. pages 59 à 76.

27 dont Elinor Ostrom, et E.Schlager « Property Rights Regimes and Natural Ressources. A Conceptual Analysis. » Land Economics, August 1992.

28 Sources: J. Gastaldi, Les plans fonciers ruraux en Côte d’Ivoire, au Bénin et en Guinée; JP. Chauveau, PM. Bosc, M. Pescay, Le plan foncier rural en Côte d’Ivoire, dans « Quelles politiques foncières pour l’Afrique rurale » Karthala, 1998. V. Basserie, KK Bini, G. Paillat, K. Yeo, Le plan foncier rural: la Côte d’Ivoire innove … dans Intercoopérants - Agridoc # 12.

29 Un certain nombre de dispositions conduit à la privatisation de l’ensemble des terres, au nom de personnes physiques ou de collectivités. Les terres dites sans maître sont déclarées appartenir à l’Etat. Toute terre non immatriculée après un certain laps de temps, (3 ans s’il y a eu concession temporaire, 10 s’il s’agit de terres où s’exerce de façon paisible des droits coutumiers) est considérée comme sans maître, et donc revient à l’Etat. Les propriétaires ont l’obligation de la mise en valeur de leurs terres, sous peine de perdre leurs droits.

30 Ce problème politique majeur dépasse le strict cadre de la sécurisation foncière mais illustre une situation assez souvent rencontrée où les interventions sur le foncier peuvent interférer directement avec de graves problèmes politiques et ethniques.

31 C’est semble-t-il le cas à Mirriah, près de Zinder, où la Commission Foncière s’est décentralisée en une centaine de Commissions Foncières de Base, qui travaillent à la reconnaissance des droits sur les espaces partagés entre éleveurs, agropasteurs, et agriculteurs. Cette instance a bénéficié d’appuis de la coopération danoise et européenne depuis de longues années. Dans d’autres régions, la mise en place des Commissions Foncières peut poser de sérieux problèmes, les résultats dépendant des rapports de force existant dans la zone et de la possibilité de les faire évoluer sans trop de conflits, avec ou sans apport externe.

32 Sources. M. Mortimore cíté dans P. Lavigne Delville, Foncier rural, ressources renouvelables et développement en Afrique (bilingue français anglais), Ministère des Affaires Etrangères - Coopération française. 1998.

33 Les différences de ce type ne se limitent pas à l’Afrique. On retrouve en Amérique Centrale des oppositions similaires entre le système d’administration des terres mis en place par l’Espagne et celui mis en place par l’Angleterre dans ses protectorats. C’est le cas par exemple au Nicaragua avec l’opposition entre la situation de la Côte Atlantique, et le royaume de la Mosquitia, sous protectorat anglais et la partie occidentale colonisée par les espagnols. Voir M. Merlet, D.Pommier et al. IRAM. Estudios sobre la tenencia de la tierra au Nicaragua, une étude inédite réalisée pour l’Oficina de Titulación Rural et la Banque Mondiale en 2000. Voir aussi sur ce sujet les deux fiches d’Olivier Delahaye sur les approches du foncier au Vénezuela et aux EUA en partie deux de ce Cahier.

34 voir fiche # 3, partie II du cahier.

35 Nous employons le terme capital sociétal pour traduire le concept anglais social capital, très utilisé aujourd’hui dans le discours sur la pauvreté, pour se référer aux normes, réseaux, et institutions qui rendent possible une action collective. Il s’agit donc en d’autres termes du niveau de structuration de la société. Le terme « capital social » en français a un sens différent, puisqu’il se réfère au patrimoine d’une entreprise ou société commerciale ou civile.

36 Selon la FAO, la proportion des terres agricoles en faire valoir indirect (pur et mixte: indirect et direct pour la même exploitation) était en 1970 de 63% en Amérique du Nord, 41% en Europe, 32% en Afrique, 16% Asie et seulement 12% en Amérique Latine. Source: A. de Janvry, K. Macours et E. Sadoulet. El acceso a tierras a través del arrendamiento. In El acceso a la tierra en la agenda de desarrollo rural. Banco Interamericano de Desarrollo. (Sustainable Development Department Technical papers series ; RUR-108). 2002.

37 Cette mobilité est essentielle pour les économies paysannes, du fait des variations au cours temps de la disponibilité en main d’œuvre dans une exploitation familiale (voir les travaux de Chayanov)

38 Voir Fiche # 14, partie II du Cahier. DANEMARK. Pionnier de la voie paysanne en Europe de l’Ouest. (C. Servolin)

39 Source principale: Rivera, Marie-Christine. Le foncier en Europe. Politiques des structures eu Danemark en France et au Portugal; Dans Cahiers Options Méditerranéennes, vol 36. 1996.

40 Cette politique peut toutefois poser aujourd’hui des problèmes dans les régions où la modernisation de l’agriculture a favorisé la consolidation de grosses exploitations qui louent la terre à un grand nombre de petits propriétaires paysans ruinés.

41 Voir Lavigne Delville, P., Toulmin C.. Colin J.P., Chauveau J.P.. L’accès à la terre par les procédures de délégation foncière (Afrique de l’Ouest rurale). Modalités, dynamiques et enjeux. 2002. IIED, GRET, IRD. 207 p.

42 Voir Alain de Janvry, Karen Macours y Elisabeth Sadoulet. El acceso a tierras a través del arrendamiento. In El acceso a la tierra en la agenda de desarrollo rural. Banco Interamericano de Desarrollo. (Sustainable Development Department Technical papers series ; RUR-108). 2002.

43 Sources: Beatriz B. Galán « Aspectos jurídicos en el acceso de la mujer rural a la tierra en Cuba, Honduras, Nicaragua y República Dominicana » FAO, 1998. et Sara Ceci. Women’s land rights: lessons learned from Nicaragua Décembre 2000.

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